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En 2020, en pleine période de pandémie, Patrick et Christine Roynette, ingénieurs de formation décident de fonder Asclepios Tech, une entreprise spécialisée dans la réduction des intrants chimiques et l’amélioration nutritionnelle des plantes. Au cœur de leur promesse : une technologie LED brevetée qui stimule les défenses naturelles du végétal par lumière modulée et qui s’avère sans effets secondaires pour l’organisme vivant.

« Très vite, des industriels français se sont montrés intéressés, et dans plusieurs domaines », explique Patrick Roynette. Pierre Fabre dans les cosmétiques, Blue Whale dans la production agricole, mais aussi LVMH… plusieurs se proposent de réaliser des PoC autour de cette technologie baptisée Boxilumix. « La clientèle française se structurait rapidement mais nous souhaitions dépasser les frontières, poursuit Patrick Roynette. Très vite, le marché allemand nous est apparu incontournable pour notre solution ».

Article Agetch + Booster Agrinest

Un tissu agricole en pleine modernisation

L’Allemagne. Un marché agricole de pointe en Europe, avec près de 15 milliards d’euros consacrés aux équipements et intrants en 2022. Une culture environnementale forte, tirée par des attentes consommateurs relayées de longue date à échelle fédérale. Et un contexte de modernisation économique qui bouleverse les pratiques. « L’agriculture allemande est traversée de multiples transformations, confirme Marie Duponchel, conseillère export Agro chez Business France. Depuis dix ans, ses exploitations se sont concentrées et, en parallèle, les nouvelles préoccupations sociétales ont fait évoluer les réglementations en matière de décarbonation et de bien-être animal ».

Les chiffres en témoignent : entre 2010 et 2022, plus de 40 000 exploitations agricoles ont disparu en Allemagne. Avec, au même moment, une hausse du nombre d’exploitations dépassant cent hectares (de 5200 à 38 000, soit 15 % de l’ensemble) et une baisse de la main d’œuvre agricole comme dans la plupart des pays d’Europe. « Cette restructuration conduit les agriculteurs à rechercher des solutions qui augmentent la productivité par actif agricole, continue Marie Duponchel. Rien qu’entre 2021 et 2022, celle-ci aurait augmenté de 39% ».

Côté réglementaire, l’Allemagne se montre particulièrement pionnière dans la fixation de normes liées au bien-être animal. En 2023, l’État fédéral imposait ainsi l’indication du mode d’élevage sur les étiquetages de produits d’origine animale ; et en 2024, des amendements sur la Loi sur la Protection des Animaux prévoient notamment la mise en place de systèmes de vidéosurveillance dans les élevages. Des réglementations qui s’ajoutent à celles observées en matière de décarbonation qui relèvent davantage de la PAC européenne et de la stratégie Farm to Fork. « Cette nouvelle donne conduit les agriculteurs à consentir une part croissante de leur budget aux investissements dans les bâtiments et les machines, témoigne Marie Duponchel. En 2022, on estime cette somme totale à un peu plus de 12 milliards d’euros dans le pays ».

Des besoins forts en solutions innovantes

Cette révolution agricole nécessite des innovations concrètes pour accompagner la rentabilité des projets. « Or, si l’Allemagne bénéficie d’un bon tissu industriel avec des constructeurs d’envergure internationale comme CLAAS, Amazone ou Grimme, elle reste demandeuse de technologies de pointe ou de solutions d’agriculture durable et se tourne plus volontiers vers ses partenaires européens ou vers les États-Unis », confirme Marie Duponchel. Les Pays-Bas et la France jouent alors aux avant-postes, avec le Danemark en embuscade pour les équipements d’élevage et l’Italie pour les intrants bio. « Il y a un vrai débouché naturel sur le marché allemand pour les innovations de rupture françaises : agriculture de précision, intrants biosourcés, solutions d’automatisation et d’efficacité énergétique… L’offre française est considérée comme précurseur sur ces sujets et la position de la France comme premier fournisseur d’équipements agricoles de l’Allemagne la place forcément dans une situation avantageuse ».

Booster AgriNest : à la découverte des marchés DACH

Retour chez Asclepios Tech. En 2024, convaincus du potentiel du marché allemand, les fondateurs s’inscrivent au Booster AgriNest de la Team France Export pour accélérer leur compréhension du marché et leur prospection. À la clé pour débuter : une étude individualisée sur chaque marché de la zone DACH (Allemagne, Autriche, Suisse alémanique). « L’objectif pour moi était de valider l’appétence du marché DACH sur notre solution et de comprendre les leviers culturels propres à ces pays pour travailler sur l’acceptation d’une innovation de rupture comme la nôtre », témoigne Patrick Roynette. Après étude de marché, l’adéquation de son produit Boxilumix aux attentes des acteurs régionaux ne fait plus aucun doute : outre l’atout environnemental qu’elle représente, elle apporte une vraie garantie sanitaire dans une zone DACH qui surveille particulièrement les seuils de mycotoxines.

En mars 2024, Patrick Roynette intègre donc la promotion de l’AgriNest à Paris et rencontre ses acolytes du programme – « des sociétés en apparence concurrentes mais qui vont apprendre à prospecter et pitcher ensemble, au bénéfice de tous ». Très vite, les ateliers de présentation s’enchaînent : experts français, représentants allemands, sessions collectives et individuelles… « J’ai été impressionné par l’excellence des personnes qui animent cela. Pour des petites sociétés comme la nôtre, cela donne une vraie confiance pour oser ensuite se confronter au marché allemand ».

Convaincre la chaîne de valeur agricole allemande

Car l’AgriNest se poursuit logiquement sur le terrain, au plus près des donneurs d’ordre : pendant quatre jours, les participants se retrouvent sur le sol allemand, en déplacements collectif et individuel, à rencontrer les acteurs de l’écosystème Agtech et à défendre leurs solutions. « J’ai eu l’opportunité de rendre visite à des équipes de recherche travaillant sur les vignes et les pommes, mais aussi à des groupements de producteurs, et enfin à des représentants de la distribution. C’est d’ailleurs intéressant de constater comme la chaîne de valeur est très collaborative en Allemagne, et tirée par l’aval : si l’on arrive à convaincre le distributeur alors la solution peut ensuite remonter jusqu’aux coopératives productrices ». En l’occurrence, c’est le distributeur REWE qui s’intéresse de près à Boxilumix et qui propose à Patrick Roynette de financer un PoC pour promouvoir l’aspect nutritionnel de sa solution auprès des consommateurs. Un projet qui suit son cours aujourd’hui, comme la plupart des contacts initiés lors du voyage. « L’AgriNest étant un programme qui s’étend sur huit mois, on n’est pas lâchés au milieu du fleuve, il y a un vrai suivi. Et une volonté de faciliter l’accès sur la durée à un marché qui peut paraître touffu en apparence ».

Des barrières culturelles et commerciales

Car Patrick Roynette ne le masque pas : l’enjeu numéro un du marché allemand reste sa complexité, dans le ciblage des interlocuteurs comme dans la capacité à les convaincre. « Il faut trouver la bonne personne, le bon niveau de dialogue (régional, fédéral etc) et ensuite la bonne manière de l’adresser », résume Patrick Roynette. Il souligne également la méfiance que démontrent certains industriels devant des innovations récentes. « Cela ne les intéresse que si le voisin l’a déjà expérimentée », s’amuse-t-il.

« Il faut prouver l’efficacité de son produit, confirme Marie Duponchel. Avoir des références est bien sûr indispensable mais il faut également envisager des partenariats technologiques ou des collaborations avec des coopératives agricoles ou des concessionnaires pour déployer son produit à l’échelle et sur du temps long ». Certains acteurs demandent en effet plusieurs saisons de test avant de valider la fiabilité d’une solution… Une durée à anticiper dans le business plan.

Des barrières culturelles et commerciales

Une apparente complexité qui plaide donc pour des ressources dédiées une fois le contact établi : un V.I.E ou des agents spécialisés par Länder ou type de donneurs d’ordre. Les salons professionnels comme AgriTechnica, EuroTier à Hanovre ou Fruit Logistica à Berlin sont un bon moyen de se faire connaître et d’approcher des visiteurs qualifiés. Asclepios Tech se rendra d’ailleurs au Fruit Logistica pour augmenter sa visibilité et étendre son vivier de prospects, en compagnie des équipes de Business France sur le pavillon France (« Une manière de démultiplier l’impact business en complément du coaching de l’AgriNest », précise Patrick Roynette).

Sachant que le tissu d’acheteurs potentiels reste très composite : « Les coopératives agricoles comme Agravis, Baywa AG ou ZG Raiffaisen eG jouent un rôle central dans le paysage agricole allemand mais elles ne sont que des portes d’entrée : il ne faut pas hésiter ensuite à descendre sur des échelons plus granulaires pour des approches opérationnelles », conseille Marie Duponchel.

Au cœur de l’Allemagne, l’AgroTech Valley propose ainsi des clusters de recherche appliquée où acteurs privés, acteurs publics et centres de recherche peuvent collaborer. « Une preuve claire de l’engagement des décideurs sur les sujets de rénovation agricole », glisse Marie Duponchel. En 2021, l’État fédéral allemand a ainsi consacré 12 millions d’euros pour la standardisation des référentiels de données agricoles, au sein du programme Agri-Gaia. Comme une réponse aux attentes des agriculteurs qui, pour 79 % d’entre eux, se déclarent prêts à adopter les technologies de digitalisation avancée.

Se préparer au marché allemand avec le Booster AgriNest

« L’Allemagne est un marché qui présente un fossé culturel avec la France, il ne faut pas le sous-estimer, signale Patrick Roynette. C’est pour cette raison qu’être accompagnés sur du long terme comme nous l’avons été avec le Booster AgriNest est un impératif ». « Il faut être exigeant dans la préparation, confirme Marie Duponchel. Mais se rappeler aussi que c’est un marché plus avancé que la plupart des pays, qui sera forcément attentif aux innovations de rupture pourvu que celles-ci répondent à un besoin des acteurs locaux ».

Envie de révolutionner l’agriculture avec nous ? Rejoignez le Booster AgriNest dès aujourd’hui. Le Booster AgriNest 2025 débutera le 19 et 20 mars à Paris, avant un déplacement en Allemagne fin juin. Outre les solutions d’AgTech et d’agriculture durable, le programme intègre désormais les solutions dédiées au bien-être animal et à l’élevage en général.

Source: Business France Export