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Ce 5 septembre 2024, un accord de principe a été conclu entre 2 grandes entreprises d’abattage allemandes réputées. Par conséquent, le géant Tönnies récupère un grand nombre de sites appartenant initialement au groupe Vion. C’est principalement le cas de l’abattoir et atelier de découpe bovin situé à Buchloe (Bavière), qui comprend plus de 270 personnes dans la production et 100 autres dans le domaine administratif. Un site majeur qui appartenait à Vion depuis 2002 et qui est connu pour être le plus grand abattoir de la région du Souabe au sud-ouest de l’Allemagne.
L’accord concerne aussi les activités situées à Crailsheim (Bade-Wurtemberg) et à Waldkraiburg (Bavière) où 4 200 bovins sont abattus et 800 t de viande bovine sont découpées chaque semaine, détaille Vion dans un communiqué de presse. Cela concerne aussi le site de découpe localisé à Hilden (Rhénanie du Nord-Westphalie) et les usines de transformation de peaux à Memmingen et Eching Weixerau (Bavière). Finalement, le groupe Vion ne garde qu’un seul site d’abattoir bovin localisé à Fürth im Wald, tandis que Tönnies conquiert le sud de l’Allemagne.
Bien que cette transaction bouleverse et réorganise l’ensemble de la filière, elle n’est pas anodine : en crise depuis un moment, le groupe Vion avait déjà fermé certains sites récemment, dont son plus grand abattoir de porc. De la même manière, Tönnies avait déjà repris au groupe néerlandais en janvier dernier son commerce de viande d’Ahlen (Rhénanie du Nord-Westphalie) et ses exploitations bovines d’Altenbourg (Thuringe) 3 mois plus tard en avril. Ainsi, avec une perte annuelle de 108 M EUR en 2022, le groupe Vion revoit sa stratégie par nécessité et décide de se retirer du marché allemand pour se concentrer essentiellement sur la région Benelux.
Les points de vue sur cet accord inédit divergent : pour l’expert du secteur Fischer, cette reprise paraît être « l’unique solution raisonnable à prendre ». Selon lui, le géant Tönnies est « le seul capable d’assumer sur le long terme la bonne et durable gestion de ces infrastructures d’approvisionnements majeures ». Le PDG du groupe Vion, Ronald Lorgerink, explique être convaincu que « Tönnies apportera le soutien et l’attention nécessaires pour assurer la poursuite de la croissance et du succès ». Même dans la région du sud-ouest de l’Allgaü, Andreas Schmid, agriculteur et président de l’association des agriculteurs d’Ostallgäu, souligne sereinement que « Tönnies n’est pas étranger à la région. L’entreprise exploite déjà un abattoir de bovins à Kempten. La coopération se passe bien là-bas. ».
Si, pour certains, ce contrat semble être la seule solution raisonnable pour faire perpétuer ce marché, d’autres se montrent plus inquiets face à la situation et aux futurs conséquences probables. Cela concerne par exemple certains concurrents comme le producteur de viande Müller Fleisch. D’autres incertitudes pèsent sur les acteurs de l’industrie carnée bien que les chaînes d’approvisionnement et les clients existants aient été conservé après cette reprise. C’est notamment le cas des éleveurs des régions du sud de l’Allemagne qui craignent la fermeture des abattoirs. Une crainte alimentée par l’état actuel du marché de la viande en Allemagne.
En effet, l’industrie carnée est depuis quelques années confrontée à une grosse perte de vitesse. Le secteur est moins rentable et davantage concurrentiel, causant la fermeture de nombreux abattoirs bovins et porcins. La consommation de viande baisse notablement. C’est d’ailleurs ce qu’illustre l’étude de l’Office fédéral de l’agriculture et de l’alimentation (BLE), qui soulève qu’en 2023, chaque citoyen allemand a consommé en moyenne 51,6 kg hab. de viande, contre 58,5kg hab. en 2019, soit une baisse de 12 %.
Cette tendance à long terme de baisse de la consommation de viande s’impose par conséquent comme un défi pour le groupe Tönnies, en voie de devenir le plus grand abatteur de bétail de la république allemande. C’est d’ailleurs Monsieur Clemens Tönnies lui-même qui a souligné dans un rapport l’importance de préparer pour l’avenir la structure actuelle de l’activité bovine au sud de l’Allemagne, de manière à offrir une perspective durable aux agriculteurs. Selon l’expert Klaus Martin Fischer, associé du cabinet de conseil RSM Ebner Stolz, « le secteur est en pleine consolidation historique », comme l’informe le journal Handelsblatt.
Finalement, la finalisation de la transaction est prévue en 2025, étant donné la nécessité d’être approuvée par les autorités antitrust après une enquête. Cette vente par nécessité du groupe germano-néerlandais sert désormais de tremplin pour le groupe Tönnies qui solidifie son leadership sur le marché. Avec un chiffre de vente qui s'est élevé à 7,3 Mds EUR pour plus de 14 M d’animaux en 2023, l’entreprise familiale s’apprête à devenir de loin le numéro un des abatteurs bovins en Allemagne.
Sources : Katrin Terpitz, 05/09/2024, Handelsblatt ; Lara Sophie Richter, 05/09/2024, Agrarheute ; Matthias Zimmerman, 05/09/2024 ; Dirk Lenders, 05/09/2024, Lebensmittel Zeitung