Date de publication :

Secteur Produits alimentaires
Pays concerné
Allemagne
Thématique
Le bien-être animal est un enjeu central en Allemagne, influençant les attentes des consommateurs, les politiques publiques et les stratégies des distributeurs. Entre initiatives privées, comme l’ITW, et législations favorisant la transparence, ce sujet transforme profondément le marché, obligeant agriculteurs et entreprises à s’adapter.
Image info sectorielle

Lidl, le plus grand discounter d'Allemagne, a organisé en décembre dernier un événement à Cloppenburg pour discuter de la question du bien-être animal avec des agriculteurs. Animé par Top Agrar, l'événement avait pour but d'aborder les défis de la transformation de l'élevage. Christoph Graf, chef des ventes chez Lidl, a réaffirmé l'objectif de l'entreprise : atteindre 100 % de viande fraîche provenant de modes d'élevage 3 et 4 d'ici 2030. Ces modes d'élevage améliorent le bien-être animal en offrant plus d'espace, un accès à l'extérieur, et des meilleures conditions de vie. Le mode 4 inclut souvent une alimentation biologique et un accès permanent à l’extérieur.

Les Allemands sont depuis longtemps très sensibilisés à la question du bien-être animal, déjà en 2014, fut créée l’Initiative Tierwohl (ITW), l’initiative du bien-être animal, qui est une alliance intersectorielle de l’industrie allemande de la viande qui vise à promouvoir la qualité de vie des animaux dans l’élevage conventionnel de volailles et de porcs par le biais d’un soutien financier.

Dans une interview de Robert Römer, responsable du développement d’ITW, menée par Top Agrar en janvier 2025, il revient sur les 10 ans de l’alliance : il déplorait qu’en 2014 le fait que, malgré une volonté forte des politiciens, des ONG et des consommateurs d’aller vers un plus grand bien-être animal, aucun d’entre eux n'était prêt à financer directement les changements nécessaires, que ce soit via des taxes supplémentaires, des dons ou des hausses des prix des produits. ITW était la solution face à cela, car elle a financé les installations nécessaires à cette transition. Aujourd’hui, plus de 12 000 agriculteurs y participent et environ 1,5 Md EUR ont été investis sans toucher à l’argent des contribuables. Malgré les nombreuses critiques trouvant que cette initiative n’allait pas assez loin dans ces normes, Monsieur Römer rappelle la stratégie de l’ITW : « De petits pas avec un financement sûr », il mentionne également le fait que, passer tout de suite à une législation trop sévère pourrait grandement nuire aux agriculteurs et à l’économie allemande et pousser les pays voisins à faire de la concurrence déloyale.

L’alliance a fêté une grande victoire en janvier 2024 puisque l’entreprise McDonald’s a annoncé à l’occasion de le Grüne Woche (Semaine Verte) qu’il participerait à l’ITW. Petit à petit, les législations et les normes changent et vont toujours plus loin dans la protection animale.

En parallèle, en juin 2023, une loi a été élaborée par le ministère fédéral de l’Alimentation et de l’Agriculture pour assurer la transparence en ce qui concerne la manière dont les animaux sont détenus et permettre aux consommateurs de prendre une décision d’achat éclairée sur les denrées alimentaires venues d’Allemagne. Cette loi s’est concrétisée par un étiquetage en 5 catégories d’élevage : « étable », « étable et champ », « étable à l’air libre », « enclos et pâturage » et « biologique ». Les Etats membres de l’UE et les pays tiers peuvent aussi bénéficier de cet étiquetage sur la base du volontariat.

Cette loi s’est dans un premier temps appliquée uniquement au porc mais vise à s’étendre aux autres animaux (poules, vaches, dindons).

Toutes ces législations obligent les marques de la grande distribution à agir dans ce sens. Achim Spiller de l'université de Göttingen a expliqué en conférence l'importance de cette transformation pour garder le soutien du grand public et éviter le dumping du bien-être animal par les importations. Il a également noté que le commerce de détail alimentaire joue un rôle crucial en contrôlant l'accès aux produits, influençant ainsi les choix des consommateurs et faisant la promotion de pratiques durables.

Lidl prévoit de commercialiser près de 50 % de sa viande fraîche en modes d'élevage 3, 4 et 5 d'ici 2025. Cependant, des défis subsistent, notamment pour la viande de porc, où les niveaux d'élevage 3 et 4 sont encore rares. Christoph Graf a annoncé que Lidl privilégiera la viande allemande, en mettant l'accent sur le fait que tout le processus, de la naissance à l’abattage, devra se passer en Allemagne.

Les agriculteurs présents ont exprimé leurs préoccupations concernant la rentabilité des investissements dans le bien-être animal. Ils ont souligné la nécessité de revenus plus élevés pour les modes d'élevage supérieurs. La diversité des exploitations agricoles nécessite une évaluation individuelle des investissements. Néanmoins, tous les participants ont exprimé leur engagement envers un élevage durable en Allemagne et ont rappelé l'importance de la collaboration entre agriculteurs et détaillants pour relever ces défis.

La problématique du bien-être animal est donc un paramètre important à prendre en compte pour investir le marché allemand. Pour les éleveurs français cela signifie que promouvoir le respect du bien-être animal est un très bon argument qu’il faut mettre en avant.

 

Sources : Top Agrar, Anna Hüttenschmidt et Andreas Beckhove, 12 décembre 2024 ; Bundesministerium für Ernährung und Landwirtschaft, juillet 2023 ; Top Agrar, Andreas Beckhove et Marcus Arden, 08/01/2025