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Le Brésil, qui est le plus grand exportateur de bœuf au monde, a connu une évolution spectaculaire vers les régimes alimentaires à base de plantes. Le nombre de personnes se déclarant végétariennes au Brésil a presque doublé en six ans, selon un sondage de la société de recherche Ibope ; 30 millions de personnes, soit 14 % des Brésiliens, se déclaraient végétariens ou végétaliens en 2018.
Les supermarchés traditionnels proposent désormais des aliments à base de protéines végétales, en plus de la viande, de la volaille et du poisson. Dans les quartiers les plus bruyants des grandes capitales, les restaurants qui accordent autant d'attention à l'atmosphère qu'au menu servent des plats inventifs et sans viande à une foule décontractée et branchée.
Quelle transformation pour ce pays mondialement connu pour ses « churrascarias » (barbecue) à volonté ! Le Brésil est en passe de devenir une centrale d'innovation de l'alimentation à base de plantes.
Les jeunes entreprises brésiliennes de produits « plant based » ont connu une forte demande depuis que les analogues de protéines animales sont devenus largement disponibles en 2019 dans les supermarchés et les restaurants. Leurs fondateurs prédisent que dans quelques années, les consommateurs ne pourront plus faire la différence entre un hamburger fait à partir de viande de bœuf et un hamburger « plant based ».
« Nous sommes en train de vivre une révolution », a déclaré Bruno Fonseca, co-fondateur de New Butchers, l'une des nombreuses nouvelles entreprises brésiliennes qui fabriquent des répliques végétales de protéines animales, notamment des galettes de burger, des substituts de poitrine de poulet et des imitations de saumon.
Selon les experts, l'abandon des protéines animales est principalement motivé par des préoccupations sanitaires. L'obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires ont augmenté au Brésil ces dernières années, les gens ayant adopté des modes de vie plus sédentaires et la « malbouffe » étant de plus en plus bon marché et accessible.
Certains brésiliens tendent également à réduire ou à supprimer progressivement les produits d'origine animale de leur alimentation pour des motivations environnementales ou de bien-être animal.
Des groupes comme Mercy for Animals, qui a ouvert un bureau au Brésil en 2015, ont trouvé de puissants alliés locaux parmi les plus grandes célébrités populaires du pays. Anitta, l'une des plus célèbres artistes brésiliennes du moment, affirme qu'elle a réduit de façon drastique sa consommation de viande par souci d'impact environnemental.
Felipe Neto, un blogueur vidéo et entrepreneur qui compte plus de 40 millions d'abonnés sur YouTube, a annoncé l'année dernière qu'il devenait végétarien alors que le Brésil souffrait de feux exceptionnellement destructeurs en Amazonie et dans l'écorégion du Pantanal. La célébrité végétalienne la plus militante au Brésil demeure la présentatrice TV Xuxa Meneghel, dont l'émission diffusée en journée a fait sensation dans toute l'Amérique latine dans les années 1990.
Les entreprises qui s'appuyaient sur l'amour des Brésiliens pour la viande ont pris note du changement de points de vue et d'appétits et ont commencé à s'adapter au marché de plus en plus garni de produits végétaux. Outback Steakhouse, l'une des chaînes de restaurants les plus populaires au Brésil, a lancé au début de l'année 2020 un hamburger à base de brocoli et de chou-fleur.
La société brésilienne JBS, leader mondial de la transformation de viande, a lancé l'année dernière une gamme de produits à base de plantes qui sont commercialisés comme ayant la même texture et le même goût que la viande. L'entreprise affirme même que l'expansion de ce secteur est la seule façon de nourrir durablement les humains dans les décennies à venir. « La stratégie de JBS en matière de protéines végétales vise à offrir de nouvelles alternatives aux consommateurs, qu'ils soient végétaliens, végétariens ou flexitaristes ».
Marcos Leta, le fondateur de Fazenda Futuro, qui est devenue en 2019 la première grande start-up brésilienne à vendre de la viande à base de plantes dans les épiceries, a étudié la chaîne d'approvisionnement de l'industrie des produits carnés du pays et ses modèles d'exportation et pense que le Brésil a le potentiel pour devenir un grand exportateur d'aliments à base de plantes. Marcos Leta aime que ses produits soient exposés dans les supermarchés à côté des paquets de poitrines et de côtes de poulet congelées. Il affirme que ce n'est qu'une question de temps avant que lui et ses concurrents puissent produire à une échelle qui rende leurs produits compétitifs par rapport à la viande et au poulet bon marché. La société Fazenda Futuro a récemment commencé à exporter ses produits, qui comprennent des imitations de boulettes de viande, de bœuf haché et de saucisses, vers les Pays-Bas. Il a signé des accords pour la distribution au Royaume-Uni, en Allemagne et dans plusieurs pays d'Amérique latine.
Source : LONDONO, Ernesto, « Brazil Is Famous for Its Meat. But Vegetarianism Is Soaring. », 26/12/2020, The New-York Times