Date de publication :

Secteur Vins, spiritueux, bières, cidres
Thématique
Les attentes croissantes en matière de protection de l’environnement poussent l’industrie de la consigne à se restructurer. D’une part, l’Union européenne légifère sur le sujet, d’autre part, la consigne pour le vin tend peu à peu à se généraliser.
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Les fédérations de l’industrie de la consigne questionnent le règlement européen sur les emballages, qui a été validé par le conseil de l’UE mi-décembre. Si ce texte vise à réduire la masse des emballages et à valoriser l’économie circulaire, les fédérations allemandes craignent qu’il alourdisse la bureaucratie pour le système de consigne des bouteilles et le mette à mal, notamment avec l’exigence d’une mise aux normes irréaliste du système allemand, qui fonctionne depuis 120 ans. Pour la fédération, la coalition au pouvoir aurait dû davantage défende son système à Bruxelles, au nom de la protection réelle de l’environnement.

Ainsi, parmi les nouvelles mesures contraignantes qui pèseront sur la consigne en Allemagne, on compte un sigle obligatoire, des règles pour le management du système de consigne, une mise en conformité avec une obligation de documentation technique sur les emballages… De nouvelles obligations qui concerneraient ainsi les milliards de bouteilles actuellement en circulation dans le pays.

Alors que le texte européen ne prévoit l’obligation de la consigne que pour les bouteilles en plastique, en aluminium, de bière et de cidre, en Allemagne, des voix s’élèvent pour la consigne des bouteilles de vin.

Le 1er janvier 2024, l’importateur Peter Riegel et d’autres producteurs et embouteilleurs ont rejoint l’initiative « Wein-Mehrweg eG », qui avait lancé, en août 2023, la 1ère bouteille de vin réutilisable du marché. En juin 2023, le fabriquant de verre Verallia avait conçu sa propre solution réutilisable et propose également aux commerçants un service de logistique et de nettoyage autour de la bouteille, sous le nom de « Hoffmann’s Weinbar ».

Aujourd’hui, les raisons sous-tendant l’intérêt pour la consigne des bouteilles de vin sont les enjeux de protection du climat et les prix croissants du verre. Alors qu’en moyenne, 40 % boissons sont en bouteilles consignées réutilisables (et même 80 % pour la bière), le vin est traditionnellement vendu en bouteilles à usage unique. Le potentiel d’amélioration est donc énorme selon l’initiative « Wein-Mehrweg eG ». Selon son président Werner Bender, la bouteille représente à elle seule plus de 45 % de l’emprunte carbone du cycle de production d’une bouteille de vin. Avec la consigne, on pourrait ainsi éviter 50 à 60 % des émissions liées à l’emballage, et ce dès 5 ou 6 réutilisations.

De plus, les consommateurs sont très ouverts sur cette question, comme le montre une étude de marché réalisée par Verallia : les consommateurs allemands souhaitent la mise en place de la consigne pour les bouteilles de vin, et seraient même prêts à payer davantage pour celle-ci. La volonté politique est également importante. Dans le sillage du nouveau texte européen, la loi allemande sur les emballages, qui a fixé l’objectif de 70 % de bouteilles consignées, va être renforcée afin d’atteindre ce niveau, encore éloigné.

Mélanie Gratwohl, présidente de Verallia, affirme que près d’1,2 Md de bouteilles de vin sont remplies chaque année en Allemagne. Même si la consigne ne concerne que les vins qui sont consommés rapidement, il y a un grand potentiel à l’étendre à ce segment.

Les distributeurs plaident aussi pour l’introduction de bouteilles de vin consignées. Klaudia Piwowarska, porte-parole de Getränke Hoffman est certaine que « Hoffman’s Weinbar » va aider les magasins de la chaîne à attirer d’autres clients, car la durabilité prend toujours plus d’importance aux yeux des clients. De plus, si les clients sont plus fidèles, le retour des bouteilles consignées sera assuré. Grâce au soutien de l’importateur Peter Riegel, les clients de Getränke Hoffmann trouvent, depuis fin 2023, 6 différents vins bio en bouteilles consignées, dans un peu plus de la moitié des magasins de la chaîne. Les volumes vendus étaient équivalents à ceux des vins en bouteille classique, et on peut espérer que l’introduction de la consigne permettra au chiffre d’affaires du vin d’augmenter.

Werner Bender croit en une réaction en chaîne positive : si la consigne des bouteilles en vin a du succès dès le début, la demande va augmenter et s’étendre aussi à la restauration. Dans ce secteur, il sera facile de rendre les bouteilles de vin consignées en même temps que les autres. Bender est aussi en discussion avec la grande distribution alimentaire, où le principal enjeu est l’adaptation de la bouteille aux systèmes de tri automatisé.

Cependant, si la bouteille de vin consignée conquiert peu à peu le Baden-Württemberg, à l’échelle nationale, il manque encore des structures logistiques pour lui permettre de s’y implanter, dont la mise en place dépend surtout de la volonté des commerçants et des consommateurs. Melanie Gratwohl souligne une condition économique importante : Pour que le système de consigne fonctionne, il faut que les coûts engendrés par une bouteille consignée soient inférieurs à ceux d’une bouteille à usage unique. Ceci n’est réalisable que si un grand nombre de bouteilles consignées est en circulation.

C’est dans ce contexte qu’elle perçoit les autres producteurs de bouteilles consignées comme des alliés. Le besoin et la demande sont très grands, et chaque action est une pierre apportée à la construction d’un avenir durable, ajoute Gratwohl. Klaudia Piwowarska est optimiste quant à l’avenir de son entreprise, « le marché envoie au secteur du vin un signal clair vers plus de consigne ».

Sources : Dirk Omlor, Getränke News, 13 décembre 2023. Euraktiv.com, 19/12/2023. Barbara Rademacher, Getränke News, 17/01/2024