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Dans une correspondance adressée récemment à la dirigeante de la Commission européenne, un collectif de dirigeants des principales entreprises pharmaceutiques internationales a émis un avertissement sur leur présence future sur le continent européen si un environnement plus favorable à leur secteur n'est pas rapidement mis en place.
Confronté à d'éventuelles barrières douanières américaines, le secteur pharmaceutique a pris cette initiative : 32 entreprises du médicament ont conjointement interpellé la présidence de la Commission européenne, réclamant des conditions plus avantageuses pour leur industrie. Sans ces changements, ces entreprises indiquent qu'elles pourraient transférer leurs activités hors d'Europe.
Parmi les signataires figurent les responsables de plusieurs laboratoires majeurs tels que Pfizer, Eli Lilly, AstraZeneca et Sanofi.
Un déclin marqué de la position européenne
Les dirigeants sectoriels insistent sur l'urgence de la situation, affirmant que "des mesures significatives doivent être adoptées sans délai" pour "enrayer la fuite" des investissements. Sans réaction dans les 3 prochains mois, ils estiment que plus de 16 milliards EUR d'investissements prévus pourraient être compromis.
Une enquête menée par la fédération européenne du secteur révèle que la menace américaine pourrait remettre en question jusqu'à 85% des investissements planifiés (environ 50,6 milliards EUR et 50% des dépenses en recherche et développement (environ 52,6 milliards EUR). Au total, plus de 100 milliards EUR d'investissements envisagés jusqu'en 2029 seraient menacés.
Les chiffres montrent que la part européenne dans les ventes pharmaceutiques mondiales a nettement diminué, passant de 29,6% en 2004 à seulement 22,7% vingt ans plus tard, tandis que l'Amérique du Nord progressait de 47,8% à 53,3%.
Les revendications du secteur
Les entreprises pharmaceutiques s'engagent à augmenter leur présence européenne sous condition d'obtenir des "mesures ambitieuses", notamment:
- Une refonte de la politique de tarification des médicaments en Europe,
- Un financement accru pour valoriser l'innovation pharmaceutique,
- Une simplification et harmonisation du cadre réglementaire,
- Un renforcement de la protection intellectuelle et une extension de sa durée.
Cette dernière demande est particulièrement sensible alors que la Commission européenne envisage au contraire de réduire cette protection pour favoriser l'accès aux médicaments génériques.
Parallèlement, plusieurs groupes pharmaceutiques ont déjà annoncé d'importants investissements aux États-Unis, comme Eli Lilly (27 milliards USD), Johnson & Johnson (55 milliards sur quatre ans) ou encore Merck avec une nouvelle usine de vaccins en Caroline du Nord (1 milliard USD).
Dans ce contexte de tensions commerciales, l'industrie pharmaceutique accentue sa pression sur les décideurs européens.
Source : Louise Renson pour L'Echo, 15 avril 2025